
28 mai 2002
Depuis quelques jours, j’ai repris contact avec Léa. Elle m’a annoncé que son père était hospitalisé et qu’il avait probablement un cancer des poumons. De mon côté, les nouvelles n’étaient pas plus réjouissantes puisque je lui ai fait part du diagnostic du neurologue. Elle se doutait que ma mère souffrait d’autre chose qu’une thyroïdite et pour cause, Gilles mon ami décédé d’une encéphalite était son mari. Elle aussi, elle avait reconnu très tôt les symptômes d’une maladie dégénérative.
Son père était un ancien fumeur et alcoolique, il avait pourtant arrêté de fumer depuis des années. Léa n’était pas soutenue par son nouveau compagnon, un homme alcoolique aussi, qui l’enfermait dans une prison dorée comme on dit, en l’éloignant de ses amis par sa jalousie maladive. Léa répondait à tout ce qu’il demandait, quitte à trahir ses propres amis. J’en ai payé les frais quelques mois, j’ai dû couper les liens avec Léa pour ne pas entrer dans une histoire qui ne me concernait plus. Aujourd’hui elle a besoin d’aide et de soutien face à la maladie de son père qui est arrivée à un stade déjà très avancé, elle m’a donc rappelée...
Nous avons quitté l’association Aides après le décès de Gilles pour ne plus voir nos amis mourir, maintenant ce sont nos deux parents les plus proches qui sont en train de nous quitter. La vie est parfois intraitable... une fois encore, la mort nous rapproche l’une et l’autre. Nos chemins parallèles m’interpellent...
Léa a décidé de reprendre contact avec tout le monde, que cela plaise ou non à son conjoint, c’était une sage décision. Nous savions que cela ne serait pas sans conséquence pour son couple. La jalousie détruit tout.
Samedi dernier, je reprenais le travail après une semaine de repos. J’étais d’ouverture au restaurant et je finissais ma journée à 17 h. En sortant, j’ai rallumé mon portable et j’ai trouvé un texto de Léa me disant que son compagnon était parti, qu’elle avait appelé sa nièce pour qu’elle vienne chez elle le soir, car elle était au bord de la crise de nerfs. Elle avait aussi appelé son ex-belle-sœur pour ne pas rester seule, elle est venue la chercher le midi et l’a emmenée chez elle.
Je ne comprenais pas ce qui se passait, je lui ai téléphoné aussitôt pour savoir où elle était et si elle souhaitait me voir. Elle m’invita à passer chez elle, elle venait de rentrer pour recevoir sa nièce.
Je suis rentrée chez moi prendre une douche et je suis montée deux étages plus hauts. Je n’avais pas remis les pieds dans "notre" appartement depuis cinq mois. J’appréhendais de voir ce que j’allais y trouver... J’ai sonné, sa nièce m’a ouvert la porte, je suis entrée, je l’ai embrassée et je me suis avancée dans le salon. Léa était en train de se rouler un pétard... je me suis assise sur le canapé et j’ai regardé tout autour de moi. Le salon était entouré de cage à oiseaux ! Une dizaine de cages... l’appartement était méconnaissable... Je ne me sentais pas bien, j’étouffais.
Léa ne parlait pas, elle me regardait, les yeux remplis de larmes. Le chat était toujours là, il me fixait, il était beau. Le chien aussi était là, un petit caniche gris. L’ambiance parlait d’elle-même, l’atmosphère était lourde, les mots n’avaient pas tellement d’importance. Léa commanda une pizza pour que l’on dîne toutes les trois. Après le repas, le chien est venu près de moi, il s’est assis et me regardait intensément comme pour me dire "Alors ? On y va ? ". Il se souvenait sans doute que quelques mois auparavant, je l’emmenais se promener après le repas...
Léa a fini par parler et m’expliquer que son père l’inquiétait beaucoup. Elle avait passé deux jours à pleurer et son adorable compagnon n’avait pas compris sa peine. Il a préféré prendre la fuite. Il était parti dans le nord pour le week-end. Léa savait qu’elle ne pourrait pas compter sur lui et se posait des questions sur la suite à donner à leur couple. Elle découvrait le personnage qu’il était, cinq mois après leur rencontre. Léa a perdu son mari d’une encéphalite, sa sœur et son beau-frère dans un accident de voiture atroce et son père avait le cancer. Elle avait de bonnes raisons de pleurer et se sentir seule.
J’avais accompagné Léa dans toutes ces épreuves et je sais oh combien c’est une femme à la fois forte et fragile. Ma place était là de nouveau, dans l’accompagnement alors que j’avais moi-même du mal à m’accompagner sur le chemin qui m’attendait aux côtés de ma mère. Accueillir la douleur des autres est parfois une façon d’ouvrir les bras à la nôtre. Je suis restée chez Léa jusqu’à 23 h, le lendemain je travaillais très tôt. Elle avait mon planning, elle pouvait me contacter quand elle voulait.
Elle est venue prendre un café ce matin. Finalement, son père a un cancer des os, il doit passer une biopsie du poumon aujourd’hui pour savoir si la tache qu’il a sur les poumons est réellement un cancer aussi. Quoi qu’il en soit, le temps est compté...
Hier soir j’ai appris que la grand-mère de mon ami d’enfance était décédée d’un cancer du foie. C’est l’hécatombe autour de moi. Elle buvait beaucoup elle aussi. Je la connaissais bien, nous nous voyions tous les étés en vacances dans le même camping, et de temps en temps en cours d’année chez mon ami, car nos familles sont très liées. Elle avait connu mon père d’ailleurs, car ils habitaient près l’un de l’autre quand il était jeune...
Maryline
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